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Quand avez-vous commencé la flûte?

J'ai commencé la flûte traversière à l'âge de 11 ans, au conservatoire de ma ville natale, La Rochelle. Mon premier professeur s'appelait Sylvie Harlé, qui avait été l'élève de Pierre Yves Artaud. Avant de commencer la flûte traversière j'avais étudié pendant 4 ou 5 ans la flûte à bec toujours dans le même conservatoire. Mais je jouais cela très sérieusement! J'adorais la flûte à bec, mais, comme je voulais vraiment devenir musicien, je pensais qu'il fallait changer d'instrument, car on me disait que la flûte à bec offrait moins de débouché que d'autres instruments. Le choix s'est donc fait naturellement vers la flûte traversière.

 

Pourquoi avoir choisi cet instrument?

J'ai adoré le son de cet instrument la première fois que je l'ai entendu. Je suis allé dans la salle de classe de Sylvie, il y avait une élève qui jouait une étude Chopin à la flûte. C'était virtuose, ça allait vite, ça semblait facile, le son allait du grave à l'aigu en une fraction de seconde, ça a été "love at first sight". Tout ce que je ne pouvais pas faire sur une flûte à bec. C'était rentrer dans une autre dimension. On m'avait conseillé le cor, et le hautbois. J'ai toujours détesté le hautbois, sauf quand c'est joué par certaines personnes très précises. Je trouvais cet instrument bête, boiteux, ça avait l'air difficile...Bref, c'était la flûte ce jour là, et ça l'est resté toute ma vie.

 

Quel a été votre parcours?

J'ai commencé la flûte traversière à l'école nationale de musique de La Rochelle, puis à l'âge 16 ans, je suis rentré au CRR de Paris dans la classe de Sophie Cherrier, après çà une année avec Vicens Prats, puis deux ans à Londres à la Guildhall School of Music de Londres dans la classe de Paul Edmund Davies, et enfin 3 ans au CNSM de Paris, avec à nouveau Sophie Cherrier qui venait de succéder à Alain Marion.

 

Depuis quand savez-vous que faire de la fûte sera votre job?

Depuis que j'ai soufflé dans une flûte pour la première fois. J'ai toujours adoré la musique, c'était ça et rien d'autre.

 

Que préférez-vous jouer?

Ce que je préfère jouer, c'est tout le répertoire en orchestre. Pouvoir passer de Brahms à Stravinsky, de Mahler à Bach, de Ravel à Mozart, je trouve que c'est ça le luxe d'un flûtiste. Bien sûr, il y a des merveilles à jouer en tant que soliste, comme les variations de Schubert, le concerto pour flûte et harpe de Mozart ou les sonates de Bach, mais l'orchestre reste notre vivier, pour nous flûtistes. Les violonistes, ou pianistes nous snobent souvent quant à notre répertoire, bien que la flûte soit maintenant considérée comme un instrument noble, mais un pianiste ne connaîtra jamais l'extase de jouer Daphnis, le faune, ou la 4ème de Brahms au sein d'un grand orchestre...

 

Où préférez-vous jouer?

Je n'ai pas d'endroit spécifique, mais, je dirais là où les gens sont heureux d'entendre de la musique. Il y a des publiques froids et souvent austères, et ça, c'est difficile. Mais dès que vous avez à faire à un publique mélomane, c'est tout de suite merveilleux. On peut citer Paris, Berlin, Amsterdam, Londres. J'aime beaucoup le public de Los Angeles, qui est toujours enthousiaste, toujours prêt à montrer son amour pour la musique et les musiciens. Parfois même ils applaudissent trop!!! Trop souvent entre les mouvements d'une symphonie, par exemple. Mais je préfère ça au contraire...

 

Quel est votre plus beau souvenir de flûte?

J'en ai beaucoup, et je ne pourrais pas tous les citer. Mais, je me souviens du bonheur total d'être rentré à l'Opéra de Lyon, emménager à Lyon, ville que j'adore, et commencer par la flûte enchantée. Je crois que je n'ai plus jamais ressenti un tel bonheur ou telle sérénité dans ma vie de flûtiste. J'avais 22 ans, j'étais encore élève au conservatoire de Paris, j'avais réussi mon rêve, et je jouais cette musique merveilleuse, dans une ville merveilleuse. Je peux encore me revoir, ressentir toutes ces sensations, comme si c'était hier. Mais il y eu beaucoup d'autres bonheurs, mais j'avoue que cette période de ma vie était belle.

 

Quel est votre pire souvenir?

Peut être évidemment la préparation pour les concours quand j'étais jeune. Beaucoup de stress, d'incertitude, devoir convaincre sa famille, affronter les autres, battre les autres...Bref tout l'opposé de l'humanité que nous offre la musique. Mais malheureusement, il faut en passer par là...

 

Où rêvez-vous d'aller jouer?

Ce serait dans des endroits exotiques, à Tahiti, aux Maldives... En fait des endroits où la musique classique est considérée comme exotique justement!!! Sinon, plus concret, je rêve de jouer en Australie, particulièrement à Sidney. J'espère pouvoir le faire un jour.

 

Dans quel orchestre avez-vous été flûtiste solo?

Je suis aujourd'hui flûte solo de l'orchestre philharmonique de Los Angeles, et j'ai été pendant 12 ans flûte solo de l'orchestre de l'opéra national de Lyon. J'ai également joué dans les orchestre de Paris, orchestre de l'opéra de Paris, l'orchestre national de Bordeaux, l'orchestre du capitole de Toulouse, l'orchestre philharmonique de Strasbourg, l'orchestre de chambre de Lausanne, le London Symphony, le London Philharmonic, le Philharmonia, le BBC National Orchestra of Wales, le Scottish Chamber Orchestra, l'Academy of Saint Martin in the fields, le Hallé Orchestra, etc...Je dois en oublier, mais c'est à peu près ça.

 

Quelle flûte préférez-vous? (piccolo, basse, flûte baroque...)

Sans aucune hésitation la flûte en ut, celle que l'on joue tous. J'ai toujours été très mauvais au piccolo. D'ailleurs, je disais toujours que je serai flûte solo car je détestais jouer et travailler le piccolo. Heureusement que j'y suis arrivé...! Je n'ai jamais jouer de la flûte baroque, mais cet instrument m'a toujours attiré. Malheureusement, je n'ai jamais le temps de commencer. Il me faudrait juste du temps et je pourrais m'y mettre.

 

Qu'appréciez-vous le plus dans cet instrument (sonorité, timbre..)?

Sa facilité à l'écoute, son timbre, trouver la résonance à l'intérieur de notre corps. Il y a un endroit de notre corps qui fait résonner l'instrument. Quand on arrive à le trouver, c'est le bonheur. L'instrument sonne sans avoir à faire quoique ce soit. C'est ce que j'essaye de transmettre aux élèves. J'aime l'idée de souffler dans le vide, je ne pourrais jamais faire de la clarinette ou du hautbois. Beaucoup trop terre à terre pour moi.

 

Jouez-vous d'un autre instrument?

Absolument aucun autre.

 

Quel est, d'après vous, le plus grand flûtiste actuel?

Je n'aime pas trop répondre à cette question, car il y en a beaucoup, et je ne voudrais pas en citer plus que d'autre. Mais, ce que je sais, c'est qu'il y en a très peu qui arrivent à me toucher. Il y a beaucoup de superbes flûtistes, mais peu de musiciens...

 

et de tous les temps?

Bon, là, on peut citer Rampal quand même. Mais voilà, avec Rampal, c'était souvent loin d'être parfait, mais c'était un musicien extraordinaire, et le premier à pouvoir toucher et bouleverser les gens avec une flûte. On n'imagine pas en 2014 à quel point la flûte était aussi peu considérée avant que Rampal ne l'élève au statut d'instrument soliste. Je crois d'ailleurs que Rampal fait parti des artistes qui ont enregistré le plus, toutes catégorie confondue. Peut être autant ou plus que Karajan. On a compté presque 450 enregistrements, je crois qu'il y a peu de pianiste aujourd'hui, même très très connus qui ont 450 disques à leur actif...

 

Quel est votre morceau préféré?

Le prélude à l'après-midi d'un faune et le concerto pour flûte et harpe de Mozart. A chaque fois, c'est un plaisir indéfinissable...

 

Quel est votre objectif en tant que flûtiste?

Arriver à faire passer la musique avant toute chose. Ne pas être considéré comme flûtiste mais musicien. Ne pas manipuler la musique. Voilà les règles que j'espère garder toute ma vie. Je n'ai pas d'objectif de carrière précis, je n'en reviens pas d'avoir réussi à faire ce que j'ai fait, j'aurais fait la moitié de ce que j'ai accompli dans ma vie j'aurais été tout aussi heureux, alors, pour le reste, je laisse le destin décider...

 

Quel message voudriez-vous passer à tous les flûtistes?

La sonorité, la technique, ne doivent pas faire oublier l'essentiel. Transmettre ce que le compositeur a voulu dire. Nous sommes comme des serveurs en fait. Nous apportons un plat. Alors, effectivement, en tant que serveur, on peut ajouter un peu plus de sel ou de poivre, mais, l'essentiel est de respecter le plat. Le compositeur est le cuisinier, et nous devons le respecter...Aussi, se méfier des études trop longues. Je vois trop d'élèves à 25 ans ou plus refaire des master, ou autres cursus, souvent qui ne servent à rien, sauf à se rassurer de ne pas avoir à sauter dans le grand bain.

Interview

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